Aprilia-v60
Général => Général => Discussion démarrée par: SugarMc Coy le 20 février, 2012, 14:54:31 14:54
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Il faisait beau je me suis décidé à sortir, le moteur tournait depuis quelques semaines, j'ai rhabillé le prototype avec ses anciens carénages abimes, la moto torse nu, sans ses flancs, le regard vissé sur la route, une cicatrice béante et rosée au milieu du tête de fourche.
Après ma chute et mon accident, plus personne ne croit plus en l'Aprilia qui roule dans les marais la nuit, des modifications importantes, un gain de poids certain, une forme olympique sculptée sous une barre de fonte pendant les quelques semaines de réparation dans l'atelier sombre au fond du quartier, et j'étais là, avec les autres au départ de Nîmes.
Les fils pendent et la Terre du Ventoux macule encore les flancs de la beauté italienne, qui même esquintée par les falaises, rutile encore de son rouge candy sous le soleil de midi, comme Akhenaton, je viens venger l'honneur du neveu de la sœur de mon père, c'est à dire moi.
R1, S1000RR, Ninja 636 et petit Sv, en route pour les collines autour d'Alès, les routes au gout salé qui ternissent le cadre satiné et déteignent sur les jantes à 5 branches
La neige a fondu et laissé place au goudron, les rivières recommencent à murmurer, les arbres à verdir, les jours s'allongent quand ta tasse à café vibre sur sa coupelle, c'est que nos moteurs hurlent leur puissance, nous sommes au dessus de toute loi, même celle de la gravité, on prend de l'angle dans tous les coins comme un polygone, dans les rares portions propres, c'est la moto rouge avec la panthère noire peinte sur les flancs qui domine le débat, je m'extraie des courbes, et la puissance ne se perd plus, le pneu se déforme à cause des chevaux qui lui matraquent les flancs avec leurs sabots, les zigzags sinueux se tendent sous mon passage, je laisse des virages détordus dans mon sillage, comme lorsqu'on tend un fil de fer ondulé, les derniers flashes de mon accident me reviennent à l'esprit, les derniers flashes qui n'arrivent qu'avec la reproduction des mêmes gestes et circonstances, mon cœur craque dans ma poitrine qui palpite, j'évite de regarder les rochers et avec l'adamantium dont est faite ma moto, eux aussi baissent les yeux.
Je mets le gaz et la moto part sur place, tu sais quoi, dans les grosses accélérations pendant un court moment les longerons se voutent et les roues s'entrechoquent, la station ISS et les satellites dans le ciel sont guidés par l'Aprilia, c'est moi qui dessine les méridiens en labourant le sol de la vieille Europe, un freinage à la Max Biaggi en 1993, je m'enfonce jusqu'en enfer en cisaillant l'écorce terrestre de gigantesques failles sismiques.
Mes yeux sont fixés sur les trajectoires, mon sourcil droit et mon front marqués par mon dernier sanglant retour au sol, je croise mon propre regard dans le rétroviseur lors d'un pif paf, putain ce que je suis devenu.
On file sous le coucher du soleil, on se glisse dans les quelques centimètres qui séparent la terre de la nuit, lorsque le jour finit par tomber au sol, soulevant les infimes poussières solaire et les cendres du bitume éviscéré..
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Que dire... Merci de nous régaler ;)
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cerveau qui se coupe, main droite qui gratte...p'tain j'ai envie de sortir la brele !!!
Merci ;)
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Les températures et la météo ajoutées à ce récit vont me faire ressortir Bella Rossa très vite... Joliment raconté !
Raven
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j'ai fait tout pareil hier, sauf qu'avant j'avais pas niqué mon déstrié :P
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Quel narrateur, je t'envie car pour ma part je suis incapable s'aligner deux phrases par contre j'ai les mêmes symptômes que toi lors de mes rares sorties.
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tu as quand même un certain talent !! ;)
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Sacré poète ... et c'est sympa à lire 8)
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Merci compagnons, n'ayez crainte, notre cause vaincra.
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c 'est chouette !
Félicitations !
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Je découvre ici.
C'est magnifique, mais je viens de le lire dans le MJ de cette semaine, n° 2068, Courrier des lecteurs, p 12 signé Mathieu.